Réveil à six heures du matin, comme pour une journée d’examen, nous nous sommes préparés pour affronter le grand froid hivernal et le vent sifflant zurichois. Le train pris, le trajet effectué, nous sommes finalement entrés dans la demeure de Émil Bührle, dans l’enceinte du Kunsthaus Museum.
La pluie et les bourrasques se sont rapidement éteintes dans l’enceinte marbrée du musée. Nous avons été frappés, non pas par les œuvres, qui nous étaient encore cachées, mais par l’architecture moderne du bâtiment, dont les détails avaient tous été soigneusement pensés et dont les angles semblaient si droits, que Pythagore lui-même en aurait été rendu malade. Nous allions ensuite nous promener dans les couloirs sans fin. Dans une première salle, Picasso était venu nous saluer, suivi de Monet, de Manet, de Signac et de toutes les avant-gardes du XIXème et XXème siècle. Nous déambulions entre les salles, entre les époques, tous fascinés par la justesse des traits, par l’émotion des toiles et par ces savoirs acquis on ne sait comment, étalés en huile et en vernis.
Le premier rôle de l’exposition avait été donné à Niki de Saint Phalle, fameuse plasticienne franco-américaine du siècle dernier. La plus grande part du gâteau architectural lui avait été offert, retraçant la vie de la femme, passant par toutes les étapes de sa recherche et de son œuvre. Nous découvrions une profondeur d’âme insoupçonnée, enfouie derrière les motifs et les couleurs, cachée derrière les rondeurs et courbes des nanas.
Pleins d’émotion, nous avions ainsi terminé notre tour et notre visite. Au détour d’une ruelle, nous passions furtivement admirer les vitraux de Chagall, cachés au fond de l’église Fraumünster, révélés par les derniers rayons du jour. Et alors que le soleil quittait la ligne d’horizon, nous quittions à notre tour les allées pavées de Zurich, marchant le long de la voie 32, éclairés par les néons crus du sous-sol, et acceptant déjà le deuil de notre journée, qui s’éteignait en souvenirs.
Texte et photos : Paul G. (5G)